Convaincre d'abord les citoyens pour convaincre ensuite les décideurs politiques
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Bouke Billiet & Annelies Sevenant (GentsMilieuFront)
Pour l'asbl Gents MilieuFront les Quick Wins sont plus que des victoires rapides, ils constituent également une stratégie. Chaque année, l'asbl plante des centaines de jardins verticaux, jardins de façade, en collaboration avec les habitants de Gand et recherche avec les riverains des emplacements pour des futurs arbres ou des mini-forêts. Chaque initiative de verdissement, aussi modeste soit-elle, est précieuse et sert un objectif plus large : convaincre les autorités municipales de contribuer à la création d'une ville pérenne.

© Gert Arijs
Plus qu'un enjeu de rapidité
Les quick wins, à comprendre comme des gains rapides, sont souvent des petits gains, mais compte tenu de l'urgence climatique, chaque arbre planté, chaque dalle de béton retirée compte. C'est pourquoi Gents MilieuFront (GMF) a planté plus de 6 000 jardins verticaux ces dernières années, a créé plusieurs brousses gantoises (la version locale des petites forêts) et a lancé la campagne FrivoolRiool.
Pour chacune de ces activités, l'asbl recherche activement des possibilités permettant aux Gantois de mettre littéralement la main à la pâte. Rien n'est plus agréable que d'arracher soi-même des dalles du sol et de planter un arbuste ou un arbre. La brousse gantoise, aménagée dans le jardin désertique près d'un grand immeuble d'appartements, a été presque entièrement plantée par des enfants enthousiastes provenant d'une école voisine.
C'est ainsi que l'on passe d'un Quick Wins à un gain quadruplé. Premièrement, l'organisation suscite ainsi l’intérêt et l’amour du grand public pour les espaces verts urbains. Deuxièmement, travailler ensemble à la végétalisation des espaces crée des liens. Troisièmement, ces travaux bénévoles rendent le travail moins coûteux. Enfin, GMF surmonte ainsi la réticence de la commune à se lancer dans un ambitieux projet de verdissement.
Des jardins verticaux ou jardins de façade
Les avantages des façades végétalisées sont nombreux : elles rafraîchissent l'environnement immédiat, purifient l'air, favorisent la biodiversité urbaine, contribuent à la santé mentale et physique des riverains, renforcent la cohésion sociale et embellissent la rue (et la parfument agréablement). De plus, elles sont peu coûteuses et faciles à réaliser.
Le trottoir est public, la façade est privée. C'est à cette frontière que les citoyens et les décideurs politiquesse rencontrent. La Geveltuinbrigade - la Brigade des jardins verticaux - un projet de GMF, est un intermédiaire enthousiaste. La brigade a vu le jour en 2017 sous la forme d'un projet de budget citoyen et a connu un grand succès dès le départ. Depuis, les brigadiers (freelances et bénévoles) ont aménagé près de six mille jardins de façade à Gand. Tout le matériel nécessaire à la réalisation de la façade peut être transporté dans un vélo cargo. Une fois sur place, il suffit simplement d'une prise électrique.
...il existe clairement un large soutien en faveur de la végétalisation du quartier, facilitant la tâche des décideurs politiques qui souhaitent soutenir la Brigade des jardins verticaux.
Planter avec les voisins
La Geveltuinbrigade collabore de manière structurelle avec la ville de Gand. À la commune, on a constaté que les brigadiers travaillent moins cher que le service des espaces verts, notamment parce que les voisins collaborent avec eux. GMF parvient à aménager un grand nombre de petits jardins avec des moyens limités. Ainsi, l’asbl rend financièrement logique pour l'administration communale d'externaliser cette mission. De plus, de nombreux citoyens aspirent à plus de verdure dans leur rue et leur quartier et les jardins verticaux rendent ce désir visible.
En termes politiques, il existe clairement un large soutien en faveur de la végétalisation du quartier, facilitant la tâche des décideurs politiques qui souhaitent soutenir la Brigade des jardins verticaux. Depuis 2024, Gand mise encore davantage sur la cohésion sociale avec Planten met Buren (Planter avec les voisins). Les voisins s'inscrivent ensemble pour créer des jardins verticaux avec l'aide de la Brigade. Plus il y a de voisins, plus la ville offre d'avantages. La Brigade des jardins verticaux peut ainsi regrouper encore davantage les actions de plantation.

© Gert Sioen
L'enthousiasme attire l'enthousiasme
Le succès des jardins de façade a des répercussions au niveau administratif. Lors de la construction d'une rue, des espaces sont désormais réservés pour les plantations de façade. L'obligation d'obtenir un permis a été remplacée par une obligation de déclaration. Le soutien aux Gantois qui retirent les dalles de leur façade augmente également petit à petit : Gand fournit gratuitement des sacs à gravats, mais pas encore de moyen de transport pour évacuer les dalles, contrairement à Louvain. GMF espère que ces idées seront également intégrées dans les règlements d'urbanisme : tout comme l'obligation d'aménager un toit végétalisé sur un toit plat, on pourrait imposer de verdir les murs aveugles. Une telle règle existe déjà à Anvers. Ainsi, l'effet d'une mesure à gain rapide peut entraîner un effet boule de neige positif
Les gains rapides sont donc un excellent moyen d'accroître l'implication des habitants d’un quartier.
Des égouts coquets
Breekijzer, l'asbl qui promeut la culture de la dés-imperméabilisation en Flandre, a souligné à juste titre qu'en Flandre, nous évacuons beaucoup trop rapidement les précieuses eaux de pluie vers les égouts. Dans de nombreux endroits, une intervention simple, un gain rapide, permet d'y remédier. Le caniveau existant est conservé, mais en rendant perméable l'espace qui l'entoure, l'eau a le temps de s'infiltrer dans le sol. Bonus : la rue devient un peu plus verte. GMF trouve que c'est une excellente idée de généraliser cette pratique. Bien sûr, cela n'est pas possible partout (pente, rampes d'accès, canalisations souterraines, etc.), mais dans de nombreux endroits, oui. Comme il ne s'agit pas d'un projet de reconstruction, mais d'une intervention limitée, cela peut également se faire rapidement.
50 ans d'attente?
GMF voit ici le même potentiel que pour les jardins de façade : l'implication des riverains et la mise à l'échelle par les autorités communales. Honnêtement, les concepteurs de la ville de Gand semblent déjà avoir opéré le revirement. Dans les projets de réaménagement, un espace vert autour du caniveau est désormais le point de départ. Mais quand on sait qu'une rue gantoise n'est réaménagée en moyenne que tous les 50 à 70 ans, on comprend qu'on ne peut pas attendre aussi longtemps.
C'est pourquoi GMF a lancé la campagne Frivool Riool (égout pétillant, coquet), dans le cadre de laquelle l'asbl invite les Gantois à bien observer leur environnement : où dans leur quartier voient-ils des possibilités d'aménager un accotement vert autour du caniveau ? À l'aide d'une simple liste de contrôle et d'un modèle, ils peuvent vérifier cela et ensuite soumettre une demande à la ville. La campagne est en cours de lancement, mais l'objectif est clair : utiliser l'enthousiasme et la connaissance du terrain des citoyens pour convaincre les autorités communales à mettre en œuvre ces quick wins partout où aucun réaménagement n'est prévu (ou pas à court terme).

© Annelies Sevenant
La campagne Frivool Riool est en cours de lancement, mais l'objectif est clair : utiliser l'enthousiasme et la connaissance du terrain des citoyens pour convaincre les autorités communales à mettre en oeuvre ces quick wins partout où aucun réaménagement n'est prévu (ou pas à court terme)
Conclusion
Par définition, les quickwins ne nécessitent pas une longue préparation. L'enthousiasme conduit rapidement à des résultats visibles. Les gains rapides sont donc un excellent moyen d'accroître l'implication des habitants d’un quartier. Cela peut à son tour inspirer les décideurs politiques à apporter des améliorations structurelles dans les politiques, allant des principes de conception aux règlements d'urbanisme.



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